Récoltes. Temps des.
Temps de le prendre. Moment suspendu.
Attente. Un temps.
Temps de l’attente. De l’ennui aussi.
De l’insouciance certaine que le pire est passé.
De l’abondance et du calcul.
De la préparation de ce qui vient.
Redouté, anticipé, désiré.
De la protection et des murailles.
Des orages au loin ou bien très proches.
De l’aire, du fléau, des ânes en cercle, du silo.
De la graine désirée, priée, célébrée.
De son attente, des chants, des danses.
La profusion glorifiée, les prêtres et les soldats.
La mémoire ancienne du temps où le soc ne déchirait pas encore la terre.
Âge d’or, âge ancien, souvenir puis poèmes, chansons, mythes.
Il y aura ensuite les forteresses imprenables, les calculs complexes, le futur et son attente.
L’astronomie, les saisons, la nature à classifier.
Les lignes du roseau comme un sillon dans l’argile.
Les ordres, le palais, les scribes et les aèdes chantant la mémoire.
Il y aura le passé, le progrès, les générations, la longue litanie des rois, les batailles encore.
La culture, les rouleaux de parchemins, les tapisseries et les statues immenses.
Nous continuerons d’avancer, malgré les famines, les maladies, les catastrophes.
Simplement portés par l’euphorie de cette période extraordinaire.
Ces quelques semaines où le miracle s’accomplit. Ou ne s’accomplit pas.
Dans le seul but de le rendre plus éclatant, plus merveilleux encore.
De tenir la promesse faite il y a longtemps. Pour justifier le labeur difficile et l’injustice qui gonfle.
Tandis que s’ouvre l’enveloppe sous les coups assénés, pour libérer la graine en quoi tout repose.
Minuscule tache blanche sur la pierre glacée qui l’écrase et tourne, tourne encore plus vite.
Nous accélérerons, tenterons d’accélérer chaque tâche et de réduire la douleur.
Il nous faudra du temps.
Avant que les champs ne deviennent anodins.
Clameur lointaine du travail métallique.
Les chaînes qui nous y lient sont immenses.
Il nous reste encore du temps.